Combattre la toxicité avec des Messages en « Je »
Les employés difficiles répandent souvent leurs toxines sans que cela se voit, ce qui rend compliqué la gestion de leur impact négatif.
Dans le dernier article, nous nous sommes intéressés à parler ouvertement de ce genre de comportement. Mais que se passe-t-il si votre collègue vous évite et s’extirpe d’une réunion qui devait donner lieu à une discussion constructive ?
VOUS pouvez toujours capter leur attention de façon positive en une ou deux minutes avec un message centré sur le « Je ».
Un homme ou une femme qui s’oppose à un chef ou un collègue avec franchise et respect est une personne qui ose ! Les Messages en « Je » sont un outil pour mettre en place des barrières protectrices ou bien pour mettre à bas des barrières qui n’ont pas lieu d’être.
Parlez de VOS besoins avec le « Je »
Quand on aborde une attitude difficile chez une tierce personne, on a tendance à commencer la phrase avec « Vous ».
« Vous me mettez mal à l’aise… »
« Vous causez des problèmes quand… »
« Votre attitude… »
A QUI APPARTIENT LE PROBLEME ?
Le « Vous » implique que l’auteur du comportement a (ou bien cause) un problème. Pourtant, un comportement toxique peut servir ses objectifs.
Dans l’article précédent, nous nous sommes intéressés à l’exemple d’un chef qui touchait de façon inappropriée ses employées. Son comportement confirme qu’il pense qu’il mérite un traitement de faveur, il peut toucher… sans que cela ne le touche lui. Une plaignante peut être réaffirmée dans sa mentalité de victime, malheur à elle ! Personne ne l’aide à se délester de son fardeau.
Ce sont les autres, comme vous et moi, qui expérimentons la difficulté ; nos objectifs ne sont pas atteints. C’est le sentiment de sécurité de la femme qui est violé quand un homme choisit de toucher sa poitrine comme bon lui semble. C’est le besoin de respect du manager qui est mis à bas quand un membre de l’équipe arrive en retard aux réunions avec une tasse de café encore chaude dans la main, le tout surmonté de crème chantilly.
ASSUMEZ LA RESPONSABILITE POUR VOS BESOINS INSATISFAITS
RENDEZ-LES RESPONSABLES POUR LES CONSEQUENCES DE LEURS ACTES
Comment aborder un comportement inapproprié pour que la personne agisse en conséquence et de manière positive ?
Un message en « Je » pose les limites sans juger.
En tant qu’êtres humains et que professionnels, nous cherchons tous à se sentir à notre place et à contribuer positivement à un groupe porté par un but qui en vaut la peine. En tant que managers, nous espérons que les membres de notre équipe trouveront au travail cette communauté pleine de sens !
Quelles sont les qualités nécessaires pour rendre un environnement propice à la mise en place d’un objectif qui fait sens et d’un sentiment fort de coopération ?
- La confiance
- La confiance
- La confiance
- La sécurité, la responsabilité, l’initiative, l’engagement, la compréhension, l’acceptation, la coopération, l’accueil des différences, la joie, le rire
Des frontières claires et respectées renforcent ces qualités propices au respect.
« On fonctionne de cette manière…. Ce n’est pas comme ça que l’on procède… »
« Comme je sais que ma supérieure assure mes arrières, je suis très actif dans la recherche de moyens pour améliorer notre activité. Je pose des questions à nos clients dans le but d’avoir un retour constructif. Je propose et teste régulièrement des idées pour affiner la qualité de notre service. Je le fais car je sais qu’elle se donne beaucoup de mal pour moi aussi. »
Quand un manager s’approprie le travail de son groupe, il a franchi la limite entre travail de groupe et toxicité. La frontière a été forcée et les besoins des employés ne sont pas satisfaits.
Un message en « Je » aide à parler d’une violation d’un comportement constructif sans pour autant recourir au reproche ou à la honte.
Les Trois Parties d’un Message en « Je »
Il y a trois parties dans un message en « Je ». L’ordre n’a pas d’importance. C’est le fait de couvrir les trois éléments qui compte.
1. EXPOSEZ BRIEBVEMENT LE COMPORTEMENT INDESIRABL
« Quand vous arrivez en retard aux réunions de groupe avec une tasse de café liégeois encore chaude dans la main… »
2. PARTAGEZ VOS RESSENTIS (UN MOT PAR SENTIMENT)
« … je sens de l’injustice… »
3. REVELEZ LES CONSEQUENCES
« Parce que d’autres doivent prendre sur eux pour votre confort. Quelqu’un, moi ou un coéquipier, perd du temps à vous faire un récapitulatif de ce que l’on a déjà abordé. C’est une perte d’argent pour l’entreprise et c’est un manque de considération pour la charge de travail du collègue en question. »
OU
Exprimez ce que vous souhaiteriez
« J’aimerais que vous arriviez à l’heure. »
En ce qui concerne la partie 3, je préfère me concentrer sur les conséquences des actions perturbatrices et permettre à l’autre personne de proposer sa propre solution. Il se peut qu’ils arrivent à l’heure à la réunion avec du café pour tout le monde ! Exprimer un souhait peut paraître directif.
Un Exemple de Message en « Je »
Un professeur de management a raconté comment il avait utilisé les messages en « Je » avec les étudiants de l’université quand le groupe commençait à se dissiper. Un jeune homme en particulier, plus difficile que les autres, avait roulé des yeux, et, marmonnant quelque chose sur l’injustice de la vie, allait et venait bruyamment pendant leur temps de réunion.
Pensant, « Mais quand vont-ils grandir ?! », et sentant sa colère monter, le professeur avait décidé d’attendre le cours suivant pour réagir.
La semaine suivante, pendant une session sur le commerce mondial, il a abordé le sujet de comment saisir les fruits de la diversité en utilisant des messages en « Je ». Les gens de différentes cultures se comportent de façons qui peuvent être déstabilisantes pour les autres.
Il a partagé deux façons de traiter un problème de différence générationnelle dans sa classe :
L’option des messages en « Vous » : « Vous gênez les autres quand vous parlez pendant le cours. »
La classe a souri narquoisement. Ils avaient déjà entendu ce genre de remarques. C’est rentré dans une oreille et ressorti aussitôt par l’autre.
L’option des messages en « Je » : « Quand vous parlez pendant le cours, je me sens volé parce que le bruit supplémentaire me prive de la possibilité d’entrer en contact avec ceux de vos camarades qui sont intéressés et qui souhaitent apprendre. »
La classe s’est tue et leurs yeux se sont écarquillés. « Je pouvais les voir réfléchir… et se rendre compte qu’ils faisaient une différence dans la réussite de toute la classe », a-t-il raconté.
Des Conseils pour Réussir avec des Messages en « Je »
A. PREPAREZ-VOUS EN AMONT, AU CALME
Bonne nouvelle : un message en « Je » est rapide à dire. Si une personne qui n’a pas un bon comportement évite vos tentatives de prises de contact, un message en « Je » d’une minute attirera son attention.
Retour à la réalité : ça prend du temps à préparer.
Un des défis est d’identifier une émotion appropriée au travail.
Quand on dépasse nos limites, notre cerveau passe en mode combat, fuite ou bien arrêt. En fuite ou en arrêt, on ne rétorque pas quelque chose sur le coup. En mode combat par contre, c’est le cas… et avec des mots que l’on veut blessants.
« Je me sens violé… ridiculisé… détruit… usurpé… »
Ces émotions sont réelles et valides. En même temps, ces mots plein de jugement peuvent se retourner contre vous.
Quand notre cerveau se met en mode combat, on répond avec des mots que l’on veut blessants. Se calmer nous permet d’avoir de nouveau accès à un langage constructif.
Donnez-vous le temps de vous calmer après avoir été confronté à une situation toxique avant d’y répondre.
B. SOYEZ PRECIS
Rappelez une situation toxique qui a eu lieu.
Evitez d’employer les mots « toujours…. » et « jamais…. »
Considérez ces questions :
- Qu’est-ce qui a été fait ou dit ?
- Comment vous êtes-vous sentis après ? Comment les autres ont-ils réagis ?
- Qu’est ce qui a été le déclencheur négatif ?
- A quoi vous attendiez-vous ?
- En quoi le comportement actuel diffère-t-il des actions souhaitées ?
Essayez de définir l’écart qui pose problème. Il est utile d’identifier les qualités de l’environnement de travail que vous souhaitez pour le rendre constructif. Vous êtes-vous heurté à de la moquerie alors que vous recherchiez de la confiance ? Êtes-vous relégué à des tâches subalternes alors que vous souhaitez apprendre ?
C. UTILISEZ UN LANGAGE FACTUEL
Quand vous décrivez un comportement, remplacez le vocabulaire subjectif par une description neutre.
« Quand vous insultiez Jane… » invite à une réponse défensive.
« Quand vous avez dit à Jane qu’elle ressemblait à… » relate des faits.
D. REDIGEZ DES EBAUCHES
Plus votre message en « Je » sera clair, plus vous aurez de chance de recevoir une réponse positive.
Il se peut que vous n’ayez qu’une minute pour capter l’attention de « l’employé toxique ».
Les messages en « Je », comme tout nouveau langage, demande de l’entraînement. Imaginez que vous êtes en train de parler à un représentant d’une autre planète (D’une-Ville-Qui-Pense-Vraimeeeeent-Différemment-De-Moi). Essayez votre message en vous entrainant devant votre miroir.
Attendez-vous à rédigez plusieurs brouillons… de chacune des trois parties : le comportement, vos sentiments, et les conséquences.
Relisez. Est-ce que les sentiments sont en lien avec les conséquences ? Si ce n’est pas le cas, repensez à ce qui vous a gêné, et réessayez.
Pensez à votre message en « Je » comme un pitch court. Qui doit attirer l’attention. Qui invite à la collaboration. 10 brouillons !
E. CHOISISSEZ DES OCCASIONS
Partager et recevoir des messages en « Je » implique de la vulnérabilité et du courage. Utilisez ces ressources précieuses avec parcimonie. Il serait dommage de vous créer une réputation de quelqu’un qui ne fait que souligner les problèmes.
« Quand tu laisses le stylo ouvert sans son bouchon, je… »
« Quand tu prends le dernier Kinder à la cafétéria, je… »
Se Laisser Être Surpris par la Réponse
Certaines personnes incluent un autre élément au message en « Je » : une demande pour une action précise. J’aime croire que la personne réagira efficacement.
Le professeur d’université a également raconté « la fin de l’histoire ».
« La semaine suivante, je suis arrivé en classe en avance et l’élève le plus perturbateur était déjà là. Je suis allé le voir, lui ai fait remarquer sa ponctualité et lui ai dit à quel point j’appréciais son effort de comportement. Il a souri, eu un petit rire et a dit « Ouais. Je pense que c’est la première fois cette année ! »
Il a contribué positivement tout au long de la classe. Alors qu’il s’en allait, je lui ai de nouveau dit que j’avais remarqué sa participation pertinente. Il s’est exclamé « Et, vous savez, j’ai écouté alors même que la fille derrière moi n’arrêtait pas de me planter son stylo dans le dos pendant tout le cours. Je ne me mettrai plus devant elle ! »
Je pensais que c’était une personne toxique. Il m’a prouvé le contraire. Son comportement avait été répréhensible mais il s’est montré capable de contributions positives même dans des circonstances difficiles. Il a surpassé toutes mes attentes. »
C’est pourquoi j’aime présenter un message en « Je » et permettre à l’autre de me surprendre avec leur propre réponse constructive. Ça arrive dans la plupart des cas.
… Et si les difficultés persistent, alors il est temps d’adopter encore une autre méthode. Nous en parlerons la semaine prochaine.
Lire : Qu’est-ce qu’un employé toxique ?
Lire : Solutions alternatives au licenciement d’un employé toxique – 1/3
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